Vous étiez à la merci du monde. Pendant tout ce temps, alors que vous étiez comme balloté d’avant en arrière, vous avez désiré le détachement. Détaché, c’est être enfin libre de ne plus se sentir harassé par la vie. La vie continue, et vous poursuivez votre route de votre côté. Vous n’êtes pas si dépendant d’elle. La vie n’est pas tenue de coller à l’image que vous en avez. C’est tout à fait acceptable pour la vie d’être ce qu’elle est. Vous suivez son cours, sans que celle-ci vous heurte. Quelle que soit la vie, vous n’enragez plus contre elle. Vous n’êtes ni totalement indifférent, ni franchement déconcerté. La vie fait ses affaires de son côté, et vous faites de même du vôtre. Vous n’êtes jamais acculé et à bout. Vous jouissez d’une humeur égale.

Que les rêves deviennent réalité ou qu’ils demeurent au stade des rêves, quelle différence cela fait ? Après un moment, dans le fond, qu’est-ce que ça change ?

De toute façon, vous devez vous y faire. Désormais, vous vous accommodez de la vie et de ses événements sans vous tracasser.

Accordez à la vie le droit d’être comme elle est. Vous savez bien que la vie varie à chaque minute, que vous ne devez pas trop vous en faire. Si vous ne dites pas ‘‘oui’’ à la vie, si vous n’êtes pas singulièrement détaché de ses tours et de ses détours, alors vous êtes attaché. Et étant attaché, c’est comme si vous vous cramponniez aux gens et aux événements pour qu’ils soient tels que vous voudriez qu’ils soient. Vous ne parvenez pas à lâcher le bon vieux temps.

Il vient un temps où désormais vous ne serez plus attaché. Puis vous allez réaliser, lorsque tout est dit et tout est fait, que vous étiez encore attaché à votre attachement. Et vous qui pensiez qu’il serait si merveilleux d’être détaché ! Là, vous réalisez que l’attachement vous manque. Vous avez fini par grandir, et voilà que les hauts et les bas de la vie, du temps vous étiez tant attaché à celle-ci, finissent par vous manquer ! Vous pensiez que vous seriez dans l’allégresse et que vous sauteriez de joie. Mais la peine et l’affection semblent désormais vous manquer. L’excitation vous manque, ainsi que votre incapacité de naguère à vivre sans ceci ou cela. Vous pourriez croire que vous avez perdu votre innocence.

Il n’en est rien, Mes chers. Vous retrouvez votre innocence. Vous réalisez enfin que la vie n’est pas tenue d’être constamment dans le tumulte. Vous abandonnez la souffrance. Désormais, la vie n’est plus une lutte permanente. Vous aviez tant l’habitude de lutter que c’en était comme le pilier de votre existence. Dorénavant, vous voyez que tout ce que la vie jette à vos pieds vous importe finalement assez peu. Lorsqu’elle vous jette un os, vous réalisez soudain que l’excitation d’hier ne fonctionne plus. Lorsqu’elle vous balance une vanne, vous n’êtes plus vraiment ‘’vanné’’. Vous pourriez presque reconnaître que la colère vous manque un peu. Ah, la colère… C’était quand même le chiffon rouge de votre vie. Désormais c’est comme si vous viviez sur un plan sans vague. Ou bien c’est que les vagues de l’océan ne vous renversent plus comme elles le faisaient avant. Petites ou grandes vagues, vous cahoter d’une humeur égale. Mer calme ou mer en furie, vous restez zen.

Vous craignez quand même qu’il s’agisse ici d’indifférence, et en un sens c’est un peu cela, en effet. Pourtant, vous accordez toujours de l’attention aux gens, mais la différence c’est vous ne vous faites plus de mauvais sang. Qu’il pleuve ou qu’il vente, ok, tout va bien. Ni le vent ni la pluie n’ont désormais le pouvoir d’impacter votre vie. C’est vous qui désormais avez de l’impact dans votre vie. Et dans votre développement intérieur, vous parvenez à ce stade où vous jouissez d’une humeur égale, où désormais peu vous importe les frasques du monde et les aléas de la vie.

Les événements du monde vont et viennent, tandis que vous vous levez avec le soleil et que vous vous couchez avec lui. Comme le Viel Homme auprès de la Rivière (1), vous suivez tranquillement votre petit bonhomme de chemin.

Traduit par Jean-Christophe.
Page originale : http://www.heavenletters.org/rise-with-the-sun-set-with-the-sun.html

(1) Old Man River, chanson écrite en 1927 pour le film « Show Boat » et son refrain célèbre – « He just keep rolling along »